Texte : Corinne Schüpbach, Co-rédactrice en chef, AvenirSocial
Vous êtes membre du groupe de rédaction. Etait-ce votre premier contact avec l’association professionnelle ? Oui et non. Durant mes études, j’ai entendu parler d’AvenirSocial, mais sans devenir membre. On nous a aussi parlé du code de déontologie qui m’a énormément servi dans mes premières expériences professionnelles. Il m’a parfois servi de boussole.
Pouvez-vous nous en dire plus ? Le passage entre les trois ans d’études à construire une vision humaniste du travail social où les destinataires et leurs intérêts sont au coeur des réflexions et mes premières expériences professionnelles a été rude. Après mes études Bachelor en travail social, je suis devenue assistante sociale dans un service social communal. On attendait de moi que j’applique des mesures administratives sur un nombre conséquent de dossiers, sans véritablement avoir l’adhésion des destinataires. Avec de très nombreux dossiers et trop peu de marge de manoeuvre pour accompagner les destinataires, le contraste entre la manière dont je souhaitais me positionner pour et avec elleux et la marge de manoeuvre disponible dans les services sociaux a été déstabilisant.
Comment avez-vous navigué suite à cette expérience ? J’ai décidé de partir pour un poste de curatrice dans la même commune. J’espérais avoir plus de moyens pour intervenir auprès des personnes, mais là encore le nombre de dossiers était conséquent et le temps pour les personnes réduit à sa plus simple expression. Les dossiers se suivent et le risque de perdre de vue l’humain est grand. Finalement, les possibilités d’accompagnement dans les services d’aides contraintes sont difficiles à développer tant la cadence est rythmée. J’ai fait le choix de prendre un nouveau départ en m’orientant vers une structure associative. Puis quelques années plus tard, j’ai renforcé mes compétences en réalisant un Master en travail social.
Pourquoi un master ? C’est à la fois un temps que je me suis offert et une forme de nécessité pour répondre à mesquestionnements professionnels. Je n’étais plus sûre d’être à ma place en travail social. J’aimais mon métier, mais les conditions de travail et le manque de moyens m’ont beaucoup questionnée.
Quels changements suite à votre master ? Par la reprise de mes études, j’ai pu prendre le temps et mûrir mes réflexions sur une dimension qui me paraît centrale dans notre profession pour s’adapter aux situations et aux besoins des personnes concernées : les marges de manoeuvre dans le travail social. Ces années supplémentaires d’études et cette expertise ne se traduisent par contre pas par un meilleur salaire en Suisse romande, ce que je savais avant de m’engager dans ce processus. Voilà bientôt cinq ans que je travaille dans les CMS Vaud en tant qu’assistante sociale et j’exerce ma profession en mettant les destinataires au coeur de ma pratique autant que possible.
Est-ce toujours possible ? Je suis tributaire de la demande. Il y a des pics de demandes et parfois des phases plus calmes, sans véritable explication. Ces phases sont toutefois de plus en plus rares car les situations sont de plus en plus complexes.
Comment parvenez-vous à gérer ces situations ? Je continue de m’informer et d’échanger avec d’autres professionnel·le·s pour développer ma pratique et mettre en place de nouvelles méthodes. Cela passe par ma participation au groupe de rédaction, mais aussi par mon engagement au sein de l’Association suisse pour le travail social en lien avec la santé (SAGES).